Généralisation des tests Covid 19 et nécessité de contrôler leur fiabilité
Dans le contexte de pandémie inédit que connait l’ensemble de la population dans le monde, la recherche de tests sérologiques permettant d’identifier la présence d’anticorps, témoins de la réponse immunitaire de l’organisme est en cours. La généralisation des tests recommandée notamment par l’OMS conduit à la multiplication des propositions de tests prétendument efficaces. Le risque de voir arriver sur le marché des tests non conformes, ou inefficaces, induisant une réponse erronée par un faux positif ou un faux négatif est très élevé. Par ailleurs, le virus réserve encore des inconnues, ce qui ne permet pas de garantir une fiabilité totale à long terme des tests mis sur le marché à un instant T, en l’état des connaissances scientifiques, lesquelles évoluent chaque jour.
En conséquence, il convient d’attirer l’attention des fabricants et distributeurs qui souhaitent participer à l’effort de mise sur la marché des tests, et celle des utilisateurs, établissements de santé, professionnels de santé, laboratoires de biologie médicale, sur la nécessité d’apporter la plus grande attention aux tests afin d’éviter tout risque d’erreur pouvant avoir des conséquences en termes de sécurité sanitaire, et de responsabilité personnelle vis-à-vis des patients.
Afin de clarifier la situation, la HAS, dans le contexte d’incertitude scientifique actuel, et l’état des connaissances acquises sur le virus, présente dans un premier travail préalable à la généralisation des tests, les critères de fiabilité des tests sérologiques. Elle propose un cahier des charges détaillant les critères de qualité et d’exigence vis-à-vis de l’ensemble de ces tests afin de faciliter leur développement et l’évaluation de leur fiabilité. https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-04/cahier_des_charges_test_serologique_covid19.pdf
Il existe plusieurs catégories de tests, les tests dit PCR, qui détermine la présence du virus dans l’organisme lors d’une phase symptomatique du Covid 19, et les tests sérologiques qui permettent dans la phase asymptomatique si une réponse immunitaire a été apportée par l’organisme à une contagion passée.
Elle rappelle qu’à ce jour les seuls tests recommandés pour poser le diagnostic du COVID-19 lors de la phase aiguë sont les tests moléculaires par RT-PCR, qui reposent sur la détection du génome du virus, à partir d’un prélèvement nasopharyngé. Les tests sérologiques constituent une autre catégorie de tests qui nécessitent un prélèvement sanguin pour rechercher les anticorps produits par les cellules immunitaires d’un patient contre le virus. Mais la HAS précise qu’en l’état des connaissances scientifiques et face à la nécessité de poursuivre les études concernant la réponse immunitaire au Sras Cov 19, il convient de rester prudent dans l’utilisation des tests qui arrivent en grand nombre. Ces tests entrent dans 4 grandes catégories : les tests automatisables réalisables uniquement en laboratoire de biologie médicale, les tests unitaires utilisés comme test de diagnostic rapide réalisés en laboratoire, les tests rapides d’orientation diagnostic réalisé en dehors d’un laboratoire, par un professionnel de santé ou autotest réalisés par le patient lui-même et sans compte-rendu de résultats. En règle générale, le développement et l’évaluation d’un test diagnostic abordent trois étapes successives : la validité analytique, la validité clinique et l’utilité clinique. Or toutes ces données ne peuvent être recueillies dans cette phase de crise.
La HAS a répondu en urgence à la nécessité de mettre en place des critères parmi lesquels la présence d’un marquage CE, la valeur seuil minimale de la sensibilité clinique à 90 ou 95% pour le test positif, la valeur seuil minimale de spécificité clinique à 98% pour le test négatif. Ces critères doivent servir aux industriels et au CNR afin d’assurer la mise sur le marché de tests efficaces et sécurisés. Cela implique d’obtenir pour la mise sur le marché dans l’UE le marquage CE ( auprès d’un Organisme notifié validé) et de vérifier le marquage CE de ces produits dès lors qu’ils sont importés de territoires européens ou arrivent des pays tiers. Il convient toutefois de préciser que si le marquage CE est recommandé, la Commission européenne dans ses recommandations du 15 avril 2020 sur les tests diagnostiques in vitro COVID-19 et leur performances indique que les Etats membres peuvent à titre exceptionnel et dans l’intérêt de la protection de la santé autoriser la commercialisation de tests ne disposant pas du marquage CE. Il faut néanmoins que les performances du test figure dans sa documentation technique. Mais cela signifie que des tests nationaux ou en provenance de l’UE ou d’Etat tiers peuvent être distribués sans marquage CE. Cette situation ne vaut que pour le temps d’urgence. La Commission Européenne a également recommandé de réaliser une validation additionnelle des performances cliniques. La HAS recommande que l’évaluation du test soit effectuée par le Centre nationale de références des virus d’infections respiratoires avant tout achat ou utilisation. Elle conditionne donc la mise sur le marché et son utilisation à la validation par un organisme de référence.
Ces tests sont au plan juridique des dispositifs médicaux de diagnotic in vitro (DMIV), soumis à la directive Directive 98/79/CE ET au règlement DMDIV, qui devait entrer en application le 26 mai 2022 Règlement (UE) 2017/746 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Les autotest (TROD)
Le Règlement prévoit 4 classes de dispositifs : A (classe la moins à risque), B, C et D (classe la plus à risque). Il est donc indispensable d’identifier au plus tôt la classification des tests, qui peut aller de la classe A pour des réactifs généraux utilisés dans le laboratoire, à une classe C pour un test d’autodiagnostic, ou encore à une classe D pour un agent transmissible dans une maladie à haut risque.
Les fabricants, distributeurs, importateurs doivent donc respecter l’ensemble de la réglementation afférente aux différents types de tests applicable au sein de l’Union européenne mais aussi aux diverses réglementations applicables sur les autres territoires et notamment celle applicable aux aux USA placée sous le contrôle de la FDA. En raison du caractère exponentiel de ce marché, les risques de circulation de produits contrefaits, falsifiés, non conformes se multiplie faisant peser un risque majeur sur l’ensemble de la société.
Béatrice Espesson
Directrice du Master droit des affaires appliqué au monde de la santé